Alors que les bénéfices de la société Aéroports du Cameroun (ADC) ont bondi de plus de 40 % en 2023, les critiques sur l’état des infrastructures et la qualité des services continuent de s’accumuler. Une situation paradoxale qui interpelle sur la gestion des priorités au sein de l’entreprise publique.
La société Aéroports du Cameroun (ADC) a clôturé l’exercice 2023 avec un bénéfice net de 4,5 milliards de Fcfa, soit une augmentation de 40,5 % par rapport aux 3,2 milliards enregistrés en 2022. Ces résultats marquent un redressement significatif après une perte de 1 milliard de Fcfa entre 2021 et 2022. Le chiffre d’affaires global a atteint 35,28 milliards de Fcfa en 2023, en légère hausse par rapport aux 34,12 milliards enregistrés l’année précédente. L’excédent brut d’exploitation est également passé de 11,7 milliards en 2022 à 12,1 milliards en 2023, tandis que le résultat d’exploitation s’élève désormais à 7,8 milliards, contre 4,8 milliards en 2022.
Des infrastructures en souffrance
Ces performances financières, validées par le cabinet KPMG, contrastent fortement avec l’état des infrastructures aéroportuaires. Les sept plateformes sous la gestion de l’ADC, notamment à Douala, Yaoundé et Garoua, souffrent de nombreux dysfonctionnements. Les voyageurs dénoncent la vétusté des installations, un service d’accueil médiocre, des systèmes de gestion des bagages défaillants et des conditions de sécurité approximatives. Les compagnies aériennes internationales ne sont pas en reste. Célestin Tawamba, président du patronat camerounais, a récemment adressé une lettre au directeur général de l’ADC, fustigeant le délabrement des infrastructures. Selon lui, cette situation nuit gravement à l’attractivité du Cameroun en matière de commerce, de tourisme et d’investissements.
Un plan d’investissement en attente de résultats
Pourtant, l’ADC a annoncé un plan stratégique ambitieux pour la période 2023-2027, avec un investissement global de 74,7 milliards de Fcfa. Pour l’année 2024, une enveloppe de 11 milliards de Fcfa a été allouée à la réhabilitation des principales plateformes aéroportuaires. Mais sur le terrain, ces efforts semblent invisibles, au grand désarroi des usagers. Malgré ces annonces, l’inquiétude persiste. « Ces dysfonctionnements dissuadent les compagnies aériennes internationales de desservir le Cameroun », souligne la correspondance de Célestin Tawamba.
Des bénéfices, mais à quel prix ?
La stabilité des charges de personnel (12,5 milliards de Fcfa en 2023) et l’augmentation des revenus tirés des services vendus (34,9 milliards de Fcfa contre 33,6 milliards en 2022) contribuent aux bons résultats de l’ADC. Cependant, ces performances sont contrebalancées par une chute des profits liés à la vente des produits accessoires, passés de 430 millions de Fcfa en 2022 à 368,4 millions en 2023. Ce paradoxe entre des finances au vert et des infrastructures au rouge pose des questions sur les priorités de gestion. Si l’ADC continue de négliger ses infrastructures et la qualité des services, les bénéfices risquent d’être éphémères face à l’érosion de la satisfaction des usagers et des partenaires internationaux.
Le défi pour l’ADC est désormais de réconcilier sa performance financière avec des investissements tangibles et une amélioration visible des infrastructures. Sans cela, les plaintes risquent d’éclipser les succès financiers, ternissant l’image du Cameroun à l’international.