La Société Anonyme des Brasseries du Cameroun (SABC), leader du secteur brassicole avec 89 % de parts de marché, annonce un réaménagement de sa politique commerciale pour ses distributeurs. Face à l’inflation et à la pression fiscale, elle appelle à une stabilisation des prix des boissons. Une démarche qui pourrait impacter les consommateurs, tout en cherchant à équilibrer la filière.
Depuis le 1er novembre 2024, la SABC, filiale du groupe Castel, a mis en place des frais de chargement supplémentaires destinés à couvrir les services de manutention, contrôle, et mise à disposition des bouteilles en verre consigné. Selon Stéphane Descazeaud, Directeur général de la SABC, ce changement vise à rétablir une équité dans la chaîne d’approvisionnement face aux frais de retrait et aux majorations de prix pratiquées sur le marché. « Cette mesure assure que tous les acteurs de la filière brassicole participent équitablement aux coûts logistiques, » a précisé le DG dans un communiqué du 5 novembre 2024.
Cependant, ces nouveaux frais de chargement se répercutent sur le prix final des boissons pour les consommateurs, créant des inquiétudes sur une possible hausse générale des prix des bières et des alcools mix, malgré un blocage des prix depuis 2019.
Les revendications pour une hausse des prix ne datent pas d’hier. L’Association des producteurs d’alcool du Cameroun (CAPA), regroupant les principaux acteurs du secteur comme la SABC, Guinness Cameroun, et l’Union Camerounaise des Brasseries, a adressé en décembre 2023 une demande formelle au gouvernement pour une augmentation de 50 FCFA sur les boissons, en raison de l’inflation persistante et des taxes croissantes. Mais jusqu’à présent, cette demande n’a pas reçu de suite favorable.
Selon les chiffres communiqués par Stéphane Descazeaud en mars 2024, la SABC a enregistré en 2023 un chiffre d’affaires de 729 milliards de FCFA, soit une baisse de 4 milliards par rapport à l’année précédente. La hausse des coûts des matières premières a ajouté 33 milliards de FCFA de dépenses pour l’entreprise entre 2021 et 2023, rendant l’environnement économique encore plus difficile.
Outre l’inflation, les charges fiscales pèsent lourdement sur les performances de la SABC. En 2023, elle a déboursé plus de 367 milliards de FCFA en taxes, soit 50,3 % de son chiffre d’affaires. La pression fiscale, combinée au blocage des prix des boissons depuis cinq ans, réduit considérablement la marge de manœuvre de l’entreprise. De plus, la crise sociopolitique dans les régions anglophones du Nord-Ouest et du Sud-Ouest affecte également la distribution et les ventes.
Face à ces défis, la SABC, par la voix de son Directeur général, se dit disposée à collaborer avec les pouvoirs publics pour éviter une hausse excessive des prix pour les consommateurs finaux. « Nous souhaitons travailler avec les autorités et les parties prenantes pour garantir que ce réaménagement n’affecte pas directement les consommateurs, » a-t-il affirmé.
La démarche de la SABC reflète les tensions économiques persistantes qui pèsent sur l’industrie brassicole au Cameroun, une industrie clé qui lutte pour rester compétitive malgré un contexte difficile. Reste à voir si les efforts de la SABC pour stabiliser les prix et partager les coûts dans la chaîne de valeur permettront de maintenir l’accessibilité des produits pour les consommateurs camerounais.