Dans un contexte où le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme prennent de l’ampleur, le ministère des Finances du Cameroun a lancé une série de séminaires pour former les dirigeants des établissements de microfinance à la détection et à la prévention des flux financiers suspects.
Le rapport 2023 de la Commission nationale anti-corruption (Conac) révèle une augmentation inquiétante des cas de blanchiment d’argent et de financement du terrorisme au Cameroun. L’Agence nationale d’Investigation Financière (Anif) a enregistré 965 déclarations de soupçon en 2023, marquant une hausse de 11,05 % par rapport à l’année précédente. Les banques demeurent en tête des déclarants, représentant 68,70 % des cas, suivies par les prestataires de Mobile Money (4,25 %) et les établissements de microfinance (1,35 %).
Un séminaire pour former les acteurs clés
Face à cette crise grandissante, le gouvernement a initié une série de séminaires de formation à l’échelle nationale. La première session, tenue le 1er octobre à Yaoundé, a rassemblé des dirigeants d’établissements de microfinance. Hayatou Sanda, chef de division des établissements de microfinance, a souligné la nécessité de fournir aux participants des outils pour mieux identifier et signaler les transactions frauduleuses. Ces formations se dérouleront dans plusieurs grandes villes, telles que Douala, Limbé, Bafoussam et Garoua.
Les nouvelles technologies : un double tranchant
L’essor des technologies de paiement, notamment Mobile Money et les cryptomonnaies, complexifie la tâche des autorités. Ces systèmes rendent les transactions plus difficiles à tracer, favorisant l’anonymat des criminels. Selon l’Anif, les flux financiers illicites ayant fait l’objet de rapports en 2023 s’élèvent à 1 665 milliards de FCFA, soit une augmentation de 180 % par rapport à l’année précédente. Plus de la moitié des dossiers soumis concernent des fraudes, illustrant l’ampleur du phénomène.
Une réponse gouvernementale tardive mais essentielle
La série de séminaires est une partie d’une stratégie plus large, incluant l’installation récente des membres du Comité de coordination des politiques nationales de lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme. Le gouvernement camerounais vise à protéger le système financier national et à couper les vivres aux réseaux criminels. Cependant, l’efficacité de cette stratégie est encore à évaluer.
Un défi en constante évolution
Les experts s’accordent à dire que la montée du blanchiment d’argent exige du Cameroun de renforcer continuellement ses capacités de contrôle. « L’implication des établissements de microfinance dans cette lutte représente un progrès, mais il est crucial que les autorités s’adaptent aux nouvelles formes de criminalité financière, » souligne un spécialiste du domaine. Face à l’instabilité sécuritaire et aux enjeux économiques, le défi reste de taille et nécessite une vigilance accrue pour endiguer ce fléau.
L’initiative du Minfi est un pas dans la bonne direction, mais elle doit s’accompagner d’une adaptation rapide aux évolutions du paysage criminel pour garantir une véritable efficacité dans la lutte contre ces activités illégales.