Annoncée il y a deux ans, la Banque africaine de l’énergie (BAE) devrait être opérationnelle dès mars 2025, selon les informations obtenues lors des récentes réunions de l’Organisation des producteurs de pétrole africains (APPO) à Yaoundé. Avec 45 % de son capital déjà mobilisé, la BAE vise à financer les projets pétroliers et gaziers africains, à un moment où le désengagement occidental en matière d’énergies fossiles menace l’avenir énergétique du continent.
Lors de la 46e session du Conseil des ministres de l’Organisation des producteurs de pétrole africains (APPO), présidée par le Premier ministre camerounais Joseph Dion Ngute à Yaoundé, l’opérationnalisation de la Banque africaine de l’énergie (BAE) a constitué l’un des sujets principaux. Cette future institution, annoncée pour mars 2025, aura pour mission de combler le vide laissé par les compagnies pétrolières et les bailleurs de fonds occidentaux, désormais moins enclins à financer des projets fossiles. La BAE, dont 45 % des 5 milliards de dollars de capital social ont déjà été mobilisés, symbolise une volonté d’indépendance des nations africaines face aux impératifs imposés par les pays développés en matière de transition énergétique.
Les financements internationaux pour les énergies fossiles africaines se raréfient depuis plusieurs années. En 2021, lors de la COP26 à Glasgow, une vingtaine de pays occidentaux ont promis de mettre fin aux financements des projets pétroliers et gaziers sans technologie de capture de carbone. À cela s’ajoute la décision de la Banque mondiale en 2017 et de la Banque européenne d’investissement en 2021 de restreindre leurs investissements dans les énergies fossiles. Cependant, le continent africain, dont l’industrialisation reste faible et qui continue de dépendre des énergies fossiles pour son développement, ne dispose pas encore de moyens financiers suffisants pour une transition vers les énergies renouvelables.
Pour surmonter ce défi, l’APPO a proposé la création de la BAE, en collaboration avec l’Afreximbank, la Banque africaine d’import-export. La BAE est envisagée comme une institution panafricaine capable de financer le secteur énergétique africain. Omar Farouk Ibrahim, secrétaire général de l’APPO, a précisé que des pays comme le Nigeria, le Ghana, et l’Angola ont déjà contribué au capital de la banque, marquant une étape décisive vers son lancement effectif. Toutefois, des pays de la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (CEMAC), y compris le Cameroun, n’ont pas encore indiqué leurs quotes-parts dans le capital de la BAE, bien que leur position soit attendue à la suite des réunions de Yaoundé.
La BAE sera un levier stratégique pour financer les projets pétroliers et gaziers sur le continent, qui recèle plus de 125 milliards de barils de pétrole brut et plus de 600 000 milliards de mètres cubes de gaz. En attirant des capitaux africains, l’objectif est de renforcer les capacités locales de financement et de promouvoir une exploitation durable des ressources énergétiques du continent. Selon Boukar Moustapha, membre du conseil de l’APPO, chaque pays devra incorporer l’accord de création de la BAE dans son système juridique pour contribuer au financement de cette institution via des quotes-parts nationales.
En misant sur la BAE, l’APPO défend le droit des pays africains à exploiter leurs ressources naturelles dans un cadre qui prend en compte leurs priorités de développement, en dépit des pressions pour limiter les énergies fossiles. Dans une rare position unie, l’Afrique refuse de se conformer passivement aux standards de transition écologique fixés par les pays industrialisés. Comme l’a souligné l’APPO, les nations africaines ne peuvent ignorer les opportunités économiques offertes par leurs ressources énergétiques alors qu’elles œuvrent à améliorer le niveau de vie de leurs populations.
Si les contributions des pays membres de l’APPO continuent de progresser, la BAE pourrait bien devenir une institution phare pour l’indépendance énergétique africaine. En soutenant des projets locaux et régionaux, la banque permettra aux pays africains d’éviter une dépendance excessive aux financements extérieurs tout en facilitant une transition énergétique progressive, adaptée aux réalités du continent. Face au désengagement occidental, la BAE représente une avancée prometteuse pour l’Afrique, prête à jouer un rôle central dans l’industrie énergétique mondiale en exploitant ses propres ressources.
La Banque africaine de l’énergie est une initiative majeure qui marque un tournant dans la stratégie énergétique du continent. Avec une mobilisation de capital en cours et des objectifs clairs, cette institution a le potentiel de transformer le secteur énergétique africain, ouvrant ainsi la voie à une véritable souveraineté énergétique pour le continent.