Secteur bancaire – La BC-PME en première ligne dans une crise du crédit

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Les créances bancaires non recouvrées atteignent des sommets au Cameroun, révélant des failles inquiétantes dans le secteur financier. En cause : la forte proportion de crédits douteux, notamment au sein de la BC-PME et de la BICEC, tandis que certaines banques semblent mieux résister. Avec 774,11 milliards de FCFA de crédits en souffrance au premier semestre 2024, les banques camerounaises font face à des défis de rentabilité et de gestion des risques accrus.

Les banques camerounaises sont confrontées à une hausse inquiétante des créances en souffrance. Selon les données publiées au 30 juin 2024, le montant total des crédits non recouvrés a atteint 774,11 milliards de FCFA, marquant une augmentation de 75,3 milliards de FCFA en seulement un an. Avec un encours global de prêts de 5 606,7 milliards de FCFA, ce phénomène met en lumière les difficultés de gestion des risques au sein du secteur bancaire, accentuées par un contexte économique tendu.

Parmi les établissements les plus affectés, la Banque camerounaise des petites et moyennes entreprises (BC-PME) se distingue par un taux particulièrement préoccupant. En effet, près de 60 % de son portefeuille de prêts est classé comme créances douteuses. Cet indicateur souligne les difficultés que rencontre cette banque publique dans sa mission de soutien aux PME, essentielles au développement de l’économie locale. La situation, si elle perdure, pourrait fragiliser davantage l’institution et réduire ses capacités de financement, menaçant ainsi le tissu entrepreneurial du pays.

Autre acteur de taille, la BICEC, filiale camerounaise du groupe marocain Banque Centrale Populaire (BCP), affiche également une proportion inquiétante de créances en souffrance, atteignant 180,6 milliards de FCFA, soit environ 40 % de son portefeuille de prêts. Quant à Afriland First Bank, principal opérateur du marché camerounais, ses créances douteuses s’élèvent à 150 milliards de FCFA, représentant une part plus modérée de son portefeuille global. Cependant, l’importance de ce montant souligne une exposition au risque qui pourrait à terme peser sur la rentabilité de la banque.

Dans ce contexte de forte exposition, certaines banques tirent leur épingle du jeu. Standard Chartered Bank et Citibank, en particulier, affichent des performances exemplaires en matière de gestion des risques. Standard Chartered enregistre un taux de créances douteuses de seulement 0,20 %, tandis que Citibank reste exempte de créances non recouvrées. Cette résilience est attribuée à leur orientation stratégique vers les grandes entreprises, un segment de clientèle perçu comme moins risqué et plus stable financièrement.

Face à la montée des créances en souffrance, la Commission bancaire de l’Afrique centrale (COBAC), régulateur du secteur bancaire dans la zone CEMAC, impose aux banques camerounaises de constituer des provisions afin de couvrir une partie de ces créances. Actuellement, les provisions s’élèvent à 607,9 milliards de FCFA, garantissant une couverture de 78,5 % des crédits en souffrance. Ce ratio, supérieur aux 75 % requis par la réglementation, témoigne d’un effort de prudence du secteur face aux risques croissants.

La persistance des créances en souffrance pourrait entraîner un durcissement des critères d’octroi de crédits, limitant ainsi l’accès aux financements pour les PME, qui constituent pourtant le cœur du tissu économique camerounais. En effet, pour réduire les risques de défaut, les banques pourraient renforcer leurs conditions de crédit, une tendance susceptible d’exacerber les difficultés de financement pour les petites entreprises. Le secteur bancaire camerounais se trouve ainsi à un tournant crucial, où il devra trouver un équilibre entre prudence et soutien aux acteurs économiques.

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