Ayant subi des inondations qui ont causés la mort de plus de 10 personnes et la destruction de plus de 100 000 hectares de cultures, cette partie du Cameroun vie sous le joug d’une insécurité alimentaire alors que les solutions cosmétiques mises en place par les pouvoirs publics restent insuffisantes.
Les autorités camerounaises peinent à trouver des solutions durables face aux inondations répétées dans l’Extrême-Nord du pays. Entre août et septembre 2024, ces catastrophes naturelles ont causé la mort de 11 personnes et affecté près de 200 000 sinistrés. Le bilan provisoire fait état de la destruction de 103 000 hectares de cultures, rendant la situation encore plus critique dans une région déjà vulnérable. En plus de ces pertes, 185 écoles primaires et 13 lycées ont été inondés, ajoutant une dimension éducative à cette crise. Jean Lazare Ndongo Ndongo, préfet du département du Mayo-Danay, a exprimé ses inquiétudes lors d’une interview au Cameroon Tribune, soulignant que tous les arrondissements de sa circonscription sont touchés, y compris des localités comme Kalfou et Datchéka, jusqu’alors épargnées.
Cette situation d’urgence risque d’aggraver l’insécurité alimentaire dans la région. Si aucune intervention rapide n’est envisagée pour compenser les pertes agricoles, la population locale, déjà fragilisée, pourrait connaître des périodes de disette importantes. La question qui se pose est donc de savoir pourquoi, malgré de nombreux programmes, les pouvoirs publics ne parviennent toujours pas à endiguer ces inondations.
Le Projet d’urgence de lutte contre les inondations (Pulci), lancé en 2014 et financé à hauteur de 108 millions de dollars par la Banque mondiale, avait pour ambition de renforcer la résilience des infrastructures locales. Ce projet a permis de consolider une digue de 70 km le long de la rivière Logone et un barrage de 27 km à Maga, protégeant ainsi plus de 100 000 personnes. Cependant, ces travaux, achevés en 2020, n’ont pas été suffisants pour mettre un terme aux inondations, comme le montre la situation actuelle.
D’autres initiatives, comme la construction de drains à Maroua, n’ont pas réussi à contenir les dégâts causés par les pluies diluviennes. Célestine Ketcha Courtès, ministre de l’Habitat et du développement urbain, a promis que des efforts supplémentaires seront déployés pour traiter durablement ce problème. Elle pointe toutefois du doigt le désordre urbain, en particulier l’occupation anarchique des lits des cours d’eau et l’encombrement des systèmes d’assainissement par les déchets.
Face à ces défis, les autorités locales sont invitées à intensifier la sensibilisation auprès des populations et à renforcer les contrôles de l’urbanisme pour prévenir de nouvelles catastrophes. Mais cette gestion préventive reste insuffisante selon certains observateurs, qui estiment que seule la construction de la digue-route de Kousseri pourrait résoudre définitivement le problème.
Ce projet, annoncé par le président Paul Biya en 2012 après des inondations meurtrières, devait s’étendre sur 330 km, de Gobo à Kousseri. Mais 12 ans après, faute de financements, ce projet n’a toujours pas vu le jour. Les études de faisabilité, réalisées en 2017, estiment le coût de cette infrastructure à environ 1 000 milliards de Fcfa. Toutefois, ces études devront être actualisées, comme l’a récemment déclaré Ahadji Magra Massaou, coordonnateur du Programme de reconstruction et de développement de la région de l’Extrême-Nord (Psrdren).
Dans l’attente de solutions concrètes, la population de l’Extrême-Nord reste confrontée aux conséquences dramatiques des inondations, entre pertes agricoles, destruction des infrastructures et un risque accru d’insécurité alimentaire.