Alors que le mandat du gouverneur Abbas Mahamat Tolli a pris fin le 06 Février 2024 conformément aux statuts édités par les instances étatiques de la zone Cemac, le rappel mémo du Directeur Général du contrôle général (DGCG) de cette banque, Blaise Nsom semble provoquer des frissons pour le désormais ex gouverneur.
Dans une correspondance datée du 06 Février 2024 et adressée au vice-gouverneur, au secrétaire général et au directeur général de l’exploitation de la Banque des États de l’Afrique centrale, Blaise Nsom dans son rôle de directeur général du contrôle général à la Beac indique l’arrêt des activités du gouverneur. À la lecture de ladite correspondance, l’on décèle l’existence d’un défaut de mandat, lequel ne constitue pas un cas d’empêchement ou une absence temporaire du gouverneur mais la fin d’un mandat.
En effet, l’émetteur du courrier précise, « Dans le cadre de mes prérogatives exercées en tant que directeur général du contrôle général, garant du strict respect des textes auxquels la banque est assujettie, (…) en application des dispositions des articles 51 alinéa 3 et 51.4 des statuts, le mandat de sept ans non renouvelables de monsieur Abbas Mahamat Tolli, commencé le 6 février 2017, s’achève le 6 février 2024. À cette date, monsieur Abbas Mahamat Tolli n’a plus de mandat et d’habilitation légale à être représentant du pays dont il est originaire au sein du gouvernement de la Beac. Il y a donc vacance du poste de gouverneur de la Beac, et ce , dès le 7 février 2024 au matin ».
Alors que le gouverneur sortant l’a amère, Blaise Nsom renchéri, «… de plein droit et automatiquement, le vice-gouverneur supplée le gouverneur dans l’exercice de ses fonctions, en vertu des dispositions de l’article 52 des statuts ». Si la sortie épistolaire du directeur général du contrôle général repose essentiellement sur les dispositions des articles 50, 51 alinéas 3 et 4, et 52 des statuts de la banque centrale ( textes révisés de 2021 et consultable sur le site de la banque); le désormais ex-gouverneur Abbas Mahamat Tolli crie au scandale, évoquant une poussée vers la sortie dont des antécédents d’antan encadrent l’action de Blaise Nsom.
En effet, dans un courrier fuité en date du 07 Février 2024 (courrier non encore daté et adressé aux autres membres du gouvernement de la Beac), Abbas Mahamat Tolli rappelle à Blaise Nsom, « La nomination du gouverneur relève exclusivement de la compétence de la conférence des chefs d’État de la Cemac… ». Si de facto l’ancien gouverneur semble remettre en question la légalité des textes en vigueur et énonce par lui même l’annulation de la décision qui met fin à son mandat, il poursuit en indiquant que, « La procédure de passation des charges est clairement établie et sera assurée par le président du comité ministériel de l’Umac (Union monétaire de l’Afrique centrale).».
Par ailleurs, le même courrier attribué à l’ancien gouverneur jette en pâture Blaise Nsom, « Il n’appartient donc pas au DGCG de créer ses propres normes au sein de la banque centrale. À ce jour, aucun responsable institutionnel de la Cemac n’a quitté ses fonctions sans que la conférence des chefs d’État n’ait préalablement nommé son remplaçant. Cette règle a d’ailleurs été appliquée pour la nomination des nouveaux membres du gouvernement de la Beac, y compris celle du DGCG lui-même », Alors que les signes d’une guerre ouverte entre les autorités de la Beac sont bien perceptibles, alimentant par là même un climat délétère, le Vice-gouverneur de la Beac, le congolais Michel Dzombala dans un courrier non encore daté mais déjà signé et adressé au directeur général du contrôle général (courrier fuité le 07 Février 2024), met en avant une dérive autoritaire de Blaise Nsom tel qu’exprimé par ces quelques extraits: « En conséquence, les dispositions de votre lettre n° 052/DGCG/2024 du 06 février 2024 sont nulle et sans effet »; avec en bonus une sorte de rappel à l’ordre, « Enfin, je souhaite vivement vous inviter à faire preuve de retenue et de discernement dans vos prises d’initiatives. Depuis votre prise de fonction en qualité de directeur général du contrôle général, vous brillez sous le couvert de l’indépendance de l’audit interne, par un comportement très éloigné des principes du code de déontologie de la direction générale du contrôle général, notamment en ce qui concerne les dispositions de l’article 1.4.4. L’intérêt de la banque centrale n’est pas de s’accommoder des dirigeants dont le comportement n’honore pas son image. »
Globalement et à la lecture des différentes sorties des responsables de l’institution bancaire, la situation en interne ne semble pas au beau fixe. Alors l’un se réfère aux lois de même que les deux autres, l’on peut néanmoins observer le paradoxe de l’article 52 des statuts de la banque qui traite de la suppléance « en cas d’absence ou d’empêchement du gouverneur » tout comme les dispositions de l’article 4.2 de la charte d’audit de la Beac. Outre les lois qui s’opposent, le camp du gouverneur sortant égrène le chapelet d’une vengeance qui se mangeait froid en prenant appui sur les événements ayant opposés entre 2021 et juillet 2022.