« Si être tribaliste c’est dénoncer des agendas cachés d’individus qui veulent établir un capitalisme foncier sauvage, dans ce cas là on peut dire que je suis tribaliste »
Comment avez-vous accueilli la vague d’indignation porté sur votre personne après vos propos dans le cadre de l’émission Club d’élites ?
Comme étant tout simplement la démonstration ou l’expression de la mauvaise foi qui s’est sédimentée, cristallisée auprès d’un certain nombre de nos compatriotes. Voyez vous je n’ai ciblé aucune communauté mais les membres d’une certaine communauté se sont sentis concernés ce qui atteste de l’existence d’un projet hégémonique afin d’opérer une dictature de la pensée qui ne passe guère par moi.
Concrètement qu’est ce que « rentrez chez eux » signifie dans votre appréciation ?
Dans le contexte negro-afrocain la terre n’appartient pas à un individu mais à une communauté qui donne juste les droits d’usage. Quelque soit l’échelle qu’on prend, qu’elle soit locale, régionale ou internationale, c’est l’appropriation symbolique qu’on fait de l’espace qui pose problème, une appropriation qui fait que l’éspace n’est plus un lieu d’accueil mais un lieu transformé en lieu propre. Faudrait donc pas que les gens soient hypocrites, qu’ils assument simplement leur manière de vivre au quotidien, car, comment comprendre que dans un moment symbolique notamment la naissance d’un enfant ou une nomination et bien d’autres, des individus aillent enterrer le cordon ombilical ou fêter dans leurs villages; bien que la Constitution du Cameroun régisse que les citoyens peuvent s’établir partout où le besoin se présente pour eux. En gros, on peut faire de là où l’on s’est installé un lieu d’accueil simplement et pas un chez soi.
Êtes-vous tribaliste ?
Si être tribaliste c’est dénoncer des agendas cachés d’individus qui veulent établir un capitalisme foncier sauvage, dans ce cas là on peut dire que je suis tribaliste mais si être tribaliste c’est stigmatisé et discriminer un certain nombre de communautés au nom de leurs différences ou de leur mode de vie, dans ce cas là, c’est un qualificatif qui ne saurait m’être accolé.
Quel le regard que vous portez sur la dualité Armée-Nation au moment même où le Cameroun célèbre la 51 ème édition de la fête de l’unité ?
L’Armée et la Nation sont nécessairement deux éléments qui ne sauraient ne pas aller ensemble, car pour qu’une armée arrive à prospérer, elle a besoin de sa population; d’ailleurs, l’Etat du Cameroun a mis en route l’idée de l’armée populaire. Et lorsqu’on parle de la défense populaire, cela signifie que chaque camerounais devrait se sentir comme une excroissance de l’armée. Donc le thème de cette édition arrive à bon escient pour rappeler aux camerounais que la réussite de l’armée dépend en grande partie de leur collaboration afin de juguler les menaces qui pèsent sur le Cameroun.
Peut-on réellement parler du vivre-ensemble dans notre pays face à la montée des discours de haine ?
Oui, bien au delà de ce que l’on voit dans les espaces virtuels que sont les réseaux sociaux, où l’on a l’impression en regardant les discours de haine qui circulent et les replis identitaires y véhiculés; une fois dans la réalité, les camerounais vivent côté à côté tout en formant des unités cosmopolites où des personnes de diverses communautés cohabitent. Le vivre ensemble reste donc une réalité dans notre contexte, il suffit de voir ne serait-ce que les mariages entre communautés, les migrations des personnes qui s’installent dans des zones qui n’étaient pas initialement allouées à leur communauté c’est le cas par exemple des Etons dans la région du Sud-ouest ou alors des communautés bamilekes qui ont élus villages dans la région du Sud. Ce serait donc une sur-interprétation de penser que le Cameroun est au bord d’une l’implosion inter-communautaire, aujourd’hui, nous demandons juste de la réciprocité, que certains ne soient pas entrain d’allés s’installer chez les autres et qu’en retour ils n’acceptent pas la même chose.
Propos recueillis par Martial Obiona