Malgré un sous-sol exceptionnellement riche, le secteur minier du Cameroun peine à jouer un rôle significatif dans l’économie nationale. Réunis à Douala le 15 mai 2025, des experts ont mis en lumière trois obstacles majeurs : une fiscalité décourageante, un déficit énergétique criant et une transparence encore lacunaire. Autant de boulets à désamorcer pour espérer faire du Cameroun un acteur minier crédible.
Avec près de 500 nouveaux sites identifiés entre 2014 et 2019 dans cinq régions du pays, le Cameroun dispose d’un vaste éventail de ressources minières : or, fer, cobalt, bauxite. Pourtant, la contribution du secteur au produit intérieur brut reste inférieure à 1 %. Le paradoxe est frappant et interroge sur la capacité du pays à transformer ses richesses souterraines en leviers de croissance durable.
À Grand-Zambi, la société G-Stones Resources S.A prévoit de transformer un million de tonnes de concentrés de fer en 800 000 tonnes de billettes par an. Mais ce projet sidérurgique, stratégique pour l’industrie locale, nécessite 70 MW d’électricité, alors que Kribi — ville portuaire clé — ne dispose que de 13 MW localement disponibles. Une situation qui illustre l’incapacité actuelle du pays à garantir l’énergie nécessaire à l’industrialisation minière. Le reste de la production de la centrale de Globeleq est injecté dans le Réseau interconnecté Sud, privant les projets structurants d’approvisionnement direct.
Sur le plan fiscal, les acteurs dénoncent un régime peu attractif, notamment pour la petite mine. Clotaire Kouakep Nzengang, du Minmidt, reconnaît que la fiscalité sur la production artisanale peut atteindre 25 %, un taux jugé excessif. Le droit de préemption de l’État sur les 75 % restants, bien que théoriquement stratégique, est rarement exercé faute de moyens. Résultat : les exportations se font sans véritable valorisation locale, et les opérateurs hésitent à s’engager.
Le nouveau code minier de 2023, pourtant présenté comme innovant, est jugé incomplet par plusieurs juristes. L’avocate Me Sarada Nya dénonce l’absence d’un registre public des permis, le chevauchement des compétences entre institutions, et l’opacité autour des contrats. L’insécurité juridique, nourrie par des révisions rétroactives comme dans le cas du projet Mbalam, aurait déjà coûté 120 millions de dollars d’investissements gelés.
Malgré les ambitions portées par la Stratégie nationale de développement (SND30) autour de l’axe « mine-métallurgie-sidérurgie », le secteur reste fragilisé par une gouvernance perfectible. Experts et professionnels appellent à une meilleure synergie entre l’État, les investisseurs et les communautés locales. Pour espérer peser dans le PIB, le Cameroun devra engager des réformes profondes, audacieuses et cohérentes, afin que ses ressources minières cessent d’être une malédiction et deviennent enfin un levier de développement.