Entre 2019 et 2023, la région du Littoral a connu une véritable ruée vers la cacaoculture. Les superficies cultivées ont triplé, atteignant près de 100 000 hectares, portées par des prix records et des politiques d’accompagnement ambitieuses. Une dynamique qui redessine les contours de la filière dans cette région stratégique du Cameroun.
Selon les récentes données de l’Institut national de la statistique (INS), les plantations de cacao dans la région du Littoral sont passées de 33 820 hectares en 2019 à 97 304 hectares en 2023. Cette croissance représente 63 484 hectares supplémentaires en seulement cinq ans, un rythme inédit dans l’histoire récente de la cacaoculture camerounaise. Cette explosion des superficies s’est accélérée entre 2021 et 2023, avec en moyenne 26 202 hectares de nouvelles plantations créées chaque année. En parallèle, la production régionale a également progressé, bien que plus lentement : elle a quasiment doublé, passant de 25 900 tonnes en 2019 à 48 946 tonnes en 2023.
Le décalage entre l’augmentation des superficies et celle de la production s’explique par le temps nécessaire à la maturation des nouvelles plantations. En effet, il faut en moyenne 18 mois pour que les plants atteignent leur plein rendement, un délai qui varie selon la qualité du matériel végétal utilisé.
L’envolée des prix du cacao a été un moteur décisif de cette dynamique. Grâce à la réforme de la commercialisation et aux ventes groupées par enchères, les prix du kilogramme de fèves ont atteint des sommets. La moyenne avoisine les 1000 FCFA depuis plusieurs années, mais la campagne 2023-2024 a battu tous les records : jusqu’à 6000 FCFA le kilogramme. Une tendance qui se confirme en 2024-2025, avec des prix dépassant les 5000 FCFA.
Au-delà des prix, les initiatives institutionnelles jouent un rôle central. Le programme New Generation, lancé en 2012 par le Conseil interprofessionnel du cacao et du café (CICC), vise à insuffler un nouveau souffle à la filière en formant de jeunes agriculteurs à la culture, à la transformation et à la commercialisation du cacao. Chaque bénéficiaire, formé pendant trois ans, est accompagné dans la mise en place d’une exploitation d’au moins trois hectares. Ce programme, soutenu par des partenaires internationaux, participe activement au renouvellement des producteurs et à l’expansion des surfaces cultivées.
La région du Littoral illustre ainsi une tendance plus large à l’échelle nationale : une modernisation progressive de la filière cacao, dopée par des prix attractifs et des politiques publiques ciblées. Toutefois, le véritable défi reste de convertir cette croissance des superficies en une productivité durable et équitable, capable de renforcer la place du Cameroun sur le marché mondial tout en assurant de meilleures conditions de vie aux producteurs.