La société britannique Oriole Resources, détentrice de plusieurs permis miniers dans la région de l’Adamaoua, a sommé les orpailleurs artisanaux de quitter le site aurifère de Mbe. Une exigence qui attise les tensions locales, alors que les enjeux économiques, sociaux et environnementaux s’entremêlent dans cette zone riche en or.
Oriole Resources, titulaire du Central Licence Package (CLP), un ensemble de permis couvrant 4 091 km² dans l’Adamaoua, entend industrialiser l’exploitation aurifère à Mbe. Pour cela, la société réclame le retrait total des quelque mille orpailleurs présents à Ngaounyanga, localité enclavée à plus de 70 km de Ngaoundéré, où l’exploitation artisanale bat son plein depuis 2023. La compagnie affirme que son agrément gouvernemental lui donne un droit exclusif sur cette unité administrative, ce qui justifierait l’éviction des orpailleurs.
Cette exigence suscite la méfiance des populations locales, qui redoutent une exploitation opaque des ressources naturelles et un contournement potentiel des obligations envers l’État. Si une partie des orpailleurs a déjà quitté les lieux, la pression exercée par Oriole Resources pour un départ définitif alimente le malaise. La situation est d’autant plus tendue que l’or connaît une période faste sur le marché, avec un prix stable autour de 2750 dollars l’once, soit environ 1,6 million de Fcfa.
L’ambition de la société britannique dépasse Mbe. À Bibemi, toujours dans la région septentrionale, elle a récemment annoncé la découverte de 2,5 tonnes d’or supplémentaires. Elle envisage également l’installation de la première usine de traitement d’or du pays, d’une capacité de 10,6 tonnes par an. Ces projets s’inscrivent dans une stratégie d’accélération de l’exploration et de transition vers une exploitation industrielle.
Dans le même temps, des ONG alertent sur les dangers écologiques de l’orpaillage, notamment dans le Nord et l’Adamaoua. Le rapport de l’ONG FODER, publié le 9 mai, dénonce la dégradation de 340 hectares de terres en 2024 et la pollution des eaux par le mercure et le cyanure. Ces activités affectent 32 sites dans des zones protégées, menaçant des espèces emblématiques comme les éléphants, les lycaons et les lions.
Face à l’escalade, le gouverneur de l’Adamaoua a mis en place un comité de suivi pour apaiser les tensions et trouver un compromis. Objectif : concilier les intérêts économiques d’Oriole Resources avec la préservation de l’environnement et les moyens de subsistance des communautés locales. Selon l’ITIE, l’exploitation artisanale a produit 859,92 kg d’or en 2022, générant près de 27,5 milliards Fcfa. Un chiffre révélateur du poids économique de ces activités, même si Mbe n’y figure pas encore.