L’agence américaine Fitch Ratings a confirmé la note souveraine du Cameroun à « B » avec des perspectives négatives. Si les efforts de soutenabilité budgétaire sont salués, les incertitudes politiques, les faiblesses structurelles en gestion publique et les tensions de trésorerie continuent de freiner la confiance des investisseurs.
Le 9 mai 2025, Fitch Ratings a maintenu la note de la dette souveraine à long terme en devises étrangères du Cameroun à « B », avec une perspective négative. Malgré ce signal prudent, l’agence reconnaît les efforts du gouvernement pour maintenir la stabilité macroéconomique et améliorer la soutenabilité de la dette. Le taux d’endettement, après un pic estimé à 41,7 % du PIB en 2024, pourrait reculer à 40 % en 2026, soit un niveau inférieur à la médiane des pays notés « B » (50,6 %). Cette performance est en partie due à une stratégie de financement prudente, limitant les besoins de financement brut à 4,7 % du PIB en 2025, et à un accès relativement préservé aux marchés régionaux. Fitch salue également la solidité du programme en cours avec le FMI, qui soutient la stabilité budgétaire.
Sur le plan économique, la croissance du Cameroun reste robuste. Après une progression de 3,9 % du PIB en 2024, portée par l’agriculture, les infrastructures et l’énergie, la tendance devrait se poursuivre avec 3,9 % attendus en 2025 et 4,1 % en 2026. Le déficit du compte courant devrait se réduire à 3 % du PIB, soutenu par de bons prix du cacao et une stratégie d’industrialisation visant à limiter les importations. Le budget 2025, estimé à 7 317,7 milliards de Fcfa, prévoit une hausse significative des investissements publics à hauteur de 1 863,1 milliards de Fcfa, soit une augmentation de 16,1 %. Toutefois, cette orientation entraîne une montée de la pression sur les finances publiques, avec une hausse notable des Restes à Payer (RAP) à 853,7 milliards de Fcfa au 31 mars 2025, en progression de 37,4 % sur un an.
Malgré les avancées, Fitch alerte sur les faiblesses persistantes du cadre de gestion des finances publiques. Les arriérés intérieurs, bien qu’en baisse, restent élevés à 342 milliards de Fcfa en 2024. Le risque d’une nouvelle accumulation est réel en l’absence de réformes structurelles. Par ailleurs, les retards répétés dans le paiement de la dette extérieure témoignent de tensions de trésorerie récurrentes, même si ces retards ont été régularisés dans les délais de grâce.
Le principal point noir reste la situation politique. À quelques mois de la présidentielle d’octobre 2025, l’absence de clarification sur une éventuelle succession du président Paul Biya, âgé de 92 ans, nourrit les incertitudes. Les tensions internes au sein du parti au pouvoir et les risques d’instabilité sociale pourraient avoir un impact négatif sur la mobilisation des ressources, la mise en œuvre budgétaire, et l’accès aux financements. Fitch souligne également les défis sécuritaires persistants dans certaines régions, qui grèvent le budget de l’État et pèsent sur l’environnement des affaires.
Si le Cameroun bénéficie d’un relatif maintien de sa solvabilité internationale, grâce à des efforts visibles de gestion budgétaire et de croissance économique, la trajectoire reste fragile. La perspective négative assignée par Fitch appelle à une vigilance accrue, tant sur le plan des réformes structurelles que sur la stabilité politique à court terme.