Depuis 2005, le législateur camerounais, adossé aux décisions des instances communautaires, a entrepris d’ouvrir les vannes à plus d’actions pour le gestionnaire de l’eau potable. La Cameroon Water Utilities Corporation n’échappe pas à ce sacro-saint principe, si l’on se réfère aux dispositions de la loi n°2017/011 du 12 juillet 2017 qui détermine le régime de fonctionnement et l’étendue des prérogatives de cette entreprise à capitaux publics.
Au sein de l’opinion publique camerounaise, l’avis de sollicitation à manifestation d’intérêt international lancé le 30 avril 2025 continue de faire des vagues. Si l’ambition de préqualifier des entreprises pour la construction de lignes d’ultrafiltration et d’embouteillage de l’eau produite par la Camwater dans les 10 régions du Cameroun, trouve un écho favorable chez certains. Pour les sceptiques, cette grande majorité qui a tendance à mettre en doute les croyances et les vérités couramment admises. Le devoir d’éclairer devient un impératif indispensable.
Juridiquement, société à capital public, la Camwater est aussi une personne morale de droit privé qui assure une mission de service public. Certes, la Camwater est entièrement financée par les fonds publics. Mais son statut de personne morale de droit privé consolide l’étoffe d’une entreprise privée, car l’institution dispose à la fois d’une autonomie de gestion et d’une flexibilité opérationnelle. Elle est donc tenue à des obligations de performance économique et financière. Au sens de la morale du droit privé, la Camwater est soumise aux règles communautaires comme celle relative au droit des sociétés commerciales et du groupement d’intérêt économique tel que stipulé par les actes uniformes de l’Organisation pour l’harmonisation en Afrique du droit des affaires ( OHADA).
Si les textes de l’Ohada conforte le droit de la Camwater à pouvoir développer des stratégies et diversifier ses activités. Dans le même ton, l’entreprise publique de droit privé se voit dès lors imposer des règles de gouvernance d’entreprise standardisées, avec en amont un organigramme qui répartit clairement les rôles et les responsabilités de chaque acteur. Par ailleurs, la soumission aux règles communautaires comme celles de l’Ohada, induit Camwater, à l’obligation de tenir une comptabilité conforme aux standards de cette organisation.
Loin des hautes responsabilités, la plupart des camerounais perçoivent dans une décision d’entreprise, une volonté du manager à faire passer une idée personnelle. La récente ambition de faire embouteiller l’eau produite par la Camwater a, aux yeux de certains camerounais, pris cette allure. Pour un éclairage pratique, en toute circonstance, le Conseil d’administration reste et demeure l’organe déliberant à la Camwater. D’ailleurs les lois et décrets promulgués entre 2017 et 2018, sont assez explicites. Il s’agit notamment de la loi n°2017/011 du 12 juillet 2017 portant statut général des entreprises publiques, des décrets n° 2018/355 du 12 juin 2018, n°2018/144 du 20 février 2018, fixant les règles applicables aux marchés des enterprises publiques pour l’un et portant réorganisation de la Cameroon Water Utilities Corporation pour l’autre.
Sous le couvert de lois et décrets, il apparaît clairement que c’est le conseil d’administration qui joue un rôle de premier plan dans l’orientation stratégique de l’entreprise, l’approbation des budgets et investissements majeurs, la validation des comptes et rapports d’activités, le contrôle de la direction générale. C’est ce même organe qui décide de la diversification des activités de l’entreprise. À propos de ce conseil d’administration dont les pouvoirs sont solides, l’on observe une composition cosmopolite des parties prenantes : les représentants de l’Etat notamment les ministères concernés, des personnalités indépendantes choisies pour leur expertise et des représentants du personnel tel que prévu par la législation.
Globalement, la Cameroon Water Utilities Corporation jouit d’une qualification juridique précise. Cette dernière place l’entreprise à capitaux publics dans une position particulière où l’on dénote une dualité complémentaire entre son fonctionnement hybride et son statut d’entreprise publique à personne morale de droit privé.