Fer de Grand Zambi – 600 000 tonnes en attente d’exportation, les aciéries camerounaises en colère

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Alors que la mine de fer de Grand Zambi, dans le Sud Cameroun, s’apprête à exporter ses premières cargaisons via le port de Kribi, les industries sidérurgiques locales dénoncent une stratégie qui privilégie l’extérieur au détriment du tissu industriel national. Une situation paradoxale face à une forte demande locale non satisfaite.

Depuis novembre 2023, la société camerounaise G-Stones Resources S.A., filiale du conglomérat Bocom fondé par l’homme d’affaires Dieudonné Bougne, a extrait et entreposé 600 000 tonnes de minerai de fer brut sur le site de Bipindi-Grand Zambi, à Akom II. Ce mois de mai 2025 marque un tournant avec le lancement de la phase d’enrichissement du minerai grâce à une unité récemment installée sur place, permettant la transformation du brut en concentré de fer prêt à l’exportation.

Les exportations s’effectueront via le terminal polyvalent du port en eau profonde de Kribi, en attendant la construction du terminal spécifiquement dédié aux minerais. Cette information a été confirmée lors de la visite du ministre par intérim des Mines, Fuh Calixtus Gentry, sur le site minier le 26 avril dernier. Malgré l’absence d’un terminal adapté, les responsables portuaires assurent de la faisabilité logistique des opérations d’exportation.

Cette orientation vers l’exportation ne fait pas l’unanimité. Les aciéries locales, regroupées au sein de l’Organisation camerounaise des industries de transformation de l’acier (OCITA), dénoncent une stratégie qui les prive de la matière première tant attendue. En 2023, leur capacité de production annuelle cumulée était estimée à 627 000 tonnes, alors que l’approvisionnement en ferraille locale plafonnait entre 150 000 et 450 000 tonnes, une situation aggravée par la mauvaise qualité des déchets ferreux disponibles.

Selon une étude de l’OCITA, les aciéries camerounaises dépendent actuellement de billettes importées et autres matières premières étrangères, rendant leur production coûteuse et moins compétitive. La mise en exploitation des gisements nationaux de fer représentait donc un espoir pour relancer ce secteur stratégique.

Pour atteindre les volumes actuels, G-Stones Resources a signé en avril 2024 un partenariat avec la société chinoise Shanghaï SBM pour l’installation d’un broyeur mobile de 1 000 tonnes par heure, contre 300 tonnes précédemment. Cet équipement a permis d’accroître rapidement la capacité de transformation du minerai, justifiant le stock massif en attente aujourd’hui.

Si l’exportation du minerai enrichi pourrait générer des devises et renforcer les partenariats internationaux, la question de la transformation locale reste cruciale pour l’industrialisation du pays. À l’heure où le Cameroun cherche à créer de la valeur ajoutée sur place, le dilemme entre rentabilité immédiate et développement industriel durable s’impose plus que jamais. Le gouvernement devra trancher entre bénéfices à court terme et vision à long terme pour son secteur minier.

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