Au moment où le Cameroun s’apprête à célébrer la 139 ème édition de la fête internationale du travail, sous le thème, « Dialogue social et travail décent : pour un Cameroun serein ». Une correspondance du ministre de l’Emploi, Issa Tchiroma Bakary vient mettre à nu les vicissitudes du milieu professionnel, notamment au sein des entreprises étrangères en activités au pays de Paul Biya.
Daté du 23 avril 2025 et adressé au PDG de la société Sodicam, filiale au Cameroun du groupe Mercure International, qui exploite les supermarchés Casino et Super U. La note du ministre de l’emploi est assez explicite sur les mobiles du refus de visa de travail au Directeur Général de Sodicam, Gregory Christian Michel Brun.
Sodicam, officine pour la promotion de l’esclavage moderne
À en croire le document, le Directeur Général en poste au Cameroun depuis 5 ans déjà, se refuse à tout assainissement du « mauvais climat social » qui prévaut au sein de l’entreprise qu’il dirige. Outre ce mobile, l’instauration d’un climat de terreur et la mise en place de pratiques esclavagistes, auraient motivé la décision du Minefop à ne pas renouveler le contrat de travail de l’expatrié. « J’ai l’honneur de vous faire connaître qu’il ne m’a pas paru opportun de renouveler le visa de travail sollicité en faveur de monsieur Gregory Christian Michel Brun… », écrit le ministre.
Malgré l’usage des canaux légaux, notamment « … Les lettres de relance et des séances de travail organisées pour tenter de trouver des options d’apaisement », indique la correspondance. L’affaire Grégory Christian Michel Brun est juste l’arbre qui cache la forêt. Si pour ce cas, l’action gouvernementale a été coercitive en suggérant au PDG de l’entreprise de « cesser toute relation professionnelle avec l’intéressé, et de trouver un autre directeur général de nationalité étrangère (..) pour le remplacer ». Au fil du temps, les actes reprochés au Directeur Général de Sodicam se sont greffés aux habitudes des employeurs locaux.
Les multinationales ou la face cachée de l’iceberg
Une immersion dans les palmeraies, dans les chantiers routiers, les travaux de BTP, les exploitations minières révèlent des formes d’esclavage moderne à grande échelle. Au-delà du non-respect des quotas de travail journalier autorisé par la législation. Des pressions psychologiques, du harcèlement multiforme et autres actes immoraux sont recensés.
Alors que les entreprises chinoises installées au Cameroun ont souvent été pointées du doigt. Plus près, les entreprises locales ne font pas aussi exception. Employés de maisons, tenancières de débit de boissons, gérants de boutiques, caissières et même employés de rayon… etc, témoignent de pratiques peu orthodoxes auxquels ils ou elles font les frais. Salaires de catéchistes, coupes incompréhensibles desdits salaires, harcèlement sexuel, menaces de tout genre…. etc, tout y passe au grand dam de leur intégrité et dignité.
Selon la législation camerounaise, les contrats des travailleurs de nationalité étrangère doivent, avant tout commencement d’exécution, être visés par le ministre chargé de l’emploi. Le renouvellement dudit contrat doit également être autorisé par la même autorité. Dans le même ton, le Cameroun a signé et ratifié d’importants textes en matière de travail décent, tant pour les nationaux que pour les expatriés. Seulement, la liste non exhaustive des manquements observés remet en question la notion même de travail décent au Cameroun.