Réunis à Douala lors de la 17ᵉ réunion du PR-PICA, les acteurs de la filière coton de huit pays africains ont planché sur les menaces qui pèsent sur la culture du coton sur le continent. Ensemble, ils ont défini des pistes pour bâtir une filière plus résiliente, durable et compétitive, tout en soutenant les producteurs.
Du 8 au 11 avril, Douala a accueilli la 17ᵉ réunion bilan du Programme de Production Intégrée du Coton en Afrique (PR-PICA). Huit pays d’Afrique de l’Ouest et du Centre — Bénin, Burkina Faso, Cameroun, Côte d’Ivoire, Mali, Sénégal, Tchad et Togo — y ont pris part. Tous ont dressé le même constat : la filière cotonnière est à la croisée des chemins, confrontée à une multitude de défis économiques, climatiques, sanitaires et environnementaux. Alors que des millions de familles africaines dépendent de la culture du coton, la chute des prix mondiaux, la volatilité du dollar et la concurrence avec les fibres synthétiques fragilisent les producteurs. À cela s’ajoutent les aléas climatiques et la recrudescence des ravageurs, qui affectent directement les rendements.
Garantir un revenu décent aux producteurs
L’un des défis majeurs évoqués lors des assises est celui du revenu des producteurs. Selon les participants, il devient impératif d’améliorer la productivité tout en réduisant les coûts de production. La diversification des débouchés commerciaux, notamment par la transformation locale, est apparue comme une voie prometteuse. « Le développement de l’industrie textile locale est une priorité », a souligné Gabriel Mbairobe, ministre camerounais de l’Agriculture. Il insiste sur la nécessité d’investir dans la recherche pour mettre au point des variétés résistantes, ainsi que sur l’importance de diffuser largement ces innovations. La transformation du coton brut en produits finis permettrait non seulement d’augmenter la valeur ajoutée, mais aussi de créer des emplois en Afrique.
Enjeux climatiques et environnementaux
Le coton africain est aussi confronté à un défi climatique de taille : sécheresse, inondations et perturbations des saisons agricoles viennent bouleverser les calendriers de semis et de récolte. Les conséquences sur les rendements sont alarmantes. Par ailleurs, les pratiques agricoles doivent évoluer vers plus de durabilité. Moins d’intrants chimiques, plus de biodiversité et une gestion raisonnée des sols et de l’eau : les acteurs plaident pour une approche écologique de la production cotonnière. Le défi est aussi phytosanitaire, comme en témoigne l’explosion des populations de jassides, des insectes ravageurs qui compromettent la santé des plants.
Une stratégie de marché à repenser
Mohamadou Bayero, directeur général de la SODECOTON, insiste sur la nécessité d’adapter les stratégies de commercialisation face à la chute des cours mondiaux. Il appelle à explorer de nouveaux marchés et à se tourner vers la transformation locale, seul moyen, selon lui, de sortir de la dépendance aux exportations brutes. « Depuis trois ans, les prix du coton ont chuté de manière significative. Cela nous oblige à revoir nos modèles économiques et à anticiper les fluctuations du dollar qui affectent aussi bien les importations d’intrants que les revenus des exportations », a-t-il expliqué.
Une réponse collective pour un avenir durable
Face à ces défis multidimensionnels, le PR-PICA apparaît comme un cadre crucial de coordination. Partage d’expériences, coopération scientifique, harmonisation des politiques agricoles : les pays membres entendent travailler main dans la main. Les assises de Douala auront permis de poser les bases d’un renouveau de la filière cotonnière africaine. Une filière qui devra désormais conjuguer performance économique, responsabilité environnementale et résilience sociale.