Du 10 au 11 avril 2025, Yaoundé a accueilli la crème de l’intelligentsia financier mondial. Dans les méandres du tout premier Colloque financier international (Colfini), l’on a posé les bases de l’avenir financier d’une zone Cemac assez impactée par la montée des tensions budgétaires au sein de ses six États.
Les mutations tous azimuts au niveau mondial interpellent tant les décideurs politiques que les experts financiers de la zone Cemac. C’est dans cette optique que, les sociétés de bourse camerounaises Contacturer Capital et Horus Investment Capital, avec le concours du cabinet Akoa Mballa & Co ont organisé le Colloque financier international sous le thème « Dette souveraine des États membres de la CEMAC et opportunités de restructuration ». Loin d’être l’expression d’une parlotte à diagnostic, « Ce colloque est important, car il nous permet de donner un souffle nouveau à nos économies, en faisant le point sur l’endettement afin de savoir s’il répond aux objectifs fixés pour pouvoir lever facilement les financements pour les projets », a renseigné Paul Onono, directeur général de Contacturer Capital.
La conscience régionale, une posologie à la dette
Rehaussant le Colloque de sa présence, Louis Paul Motaze, ministre camerounais des finances a souligné que, « La question de la dette souveraine de la Cemac constitue un enjeu central en raison de son poids croissant dans les économies de la sous-région. Bien que considérée comme un levier stratégique de financement des pays de la Cemac, des solutions pratiques devraient être mises en vitrine pour mieux encadrer l’envol de la dette publique ».
Si le contexte de la dette souveraine du Cameroun indique un taux d’endettement public de 42% du PIB, soit l’un des plus faibles d’Afrique subsaharienne, et largement inférieur au seuil communautaire de 70% fixé par la Communauté économique. Le cas du Congo-Brazzaville inquiète. D’après un Bulletin statistique publié par la Caisse congolaise d’amortissement (CCA). La dette publique au pays de Denis Sassou Nguesso s’est établie à 8 530,9 milliards de Fcfa à fin 2024, soit 94,74% du PIB après 97,97% en décembre 2023 où la dette publique avait été de 8 516,36 milliards de Fcfa.
Face à des tensions budgétaires aussi perceptibles comme au Congo-Brazzaville, Pr. Bruno Bekolo Ebe, économiste camerounais de renom invite à une prise de conscience régionale dont les piliers sont le cadre juridique, les mécanismes de surveillance et l’efficacité des investissements réalisés. Car il est impératif d’améliorer la gouvernance financière dans la sous-région en vue d’une meilleure soutenabilité de la dette souveraine.
La dette souveraine, une gravité opportuniste
S’il est clair que la prise de conscience régionale ne règle à elle seule pas la question de la dette souveraine. Pour Marc Olivier Enoh Tonye, Chef de la cellule des négociations des financements à la Caisse autonome d’amortissement du Cameroun (CAA), la question de la dette souveraine de la Cemac ne devrait pas être vue en termes de gravité, mais plutôt en termes d’opportunités. En effet, la discussion sur la restructuration constitue un instrument de qualité pour améliorer l’efficacité de la dette ; une voie idéale pour garantir le développement durable des économies de la sous-région.
Sur le plan pratique, « La restructuration de la dette souveraine doit être ciblée, accompagnée, opportuniste et innovante », soutient l’employé de l’entreprise publique gestionnaire de la dette publique au Cameroun. Dans les faits, la restructuration doit être adossée aux objectifs de la stratégie d’endettement des pays de la Cemac, « Il doit y avoir un besoin qualitativement chiffré, des gains nets positifs doivent être produits en phase avec les opportunités…D’autres acteurs doivent être intégrer pour contrer la saturation observée au niveau du marché financier de la zone Cemac (notamment les règles prudentielles). Si restructurer la dette veut dire s’appuyer sur des réformes économiques et financières, il est important de partir sur des nouvelles bases en ce qui concerne l’espace Cemac », assure Marc Olivier Enoh Tonye.