En novembre 2025, l’UNESCO se choisira un nouveau directeur général. Trois personnalités issues des Suds sont en lice : l’Égyptien Khaled El-Enany, la Mexicaine Gabriela Ramos et le Congolais Firmin Edouard Matoko. Dans un contexte de fragmentation géopolitique et d’appel à une gouvernance mondiale plus équitable, cette élection pourrait marquer un tournant historique pour l’organisation.
L’Afrique, avec ses 54 États et 1,3 milliard d’habitants, reste marginalisée dans les instances internationales. À l’image du Conseil de sécurité de l’ONU où elle ne dispose que de trois sièges non permanents, le continent, comme l’ensemble des Suds, appelle de longue date à un rééquilibrage de la gouvernance mondiale. Ce besoin de représentation s’exprime aussi dans les institutions culturelles et éducatives, à l’instar de l’UNESCO, dont le prochain directeur général sera élu en novembre 2025.
Parmi les candidats déclarés pour le mandat 2025-2029, trois viennent du Sud global. Khaled El-Enany, ancien ministre égyptien du Tourisme et des Antiquités, a reçu un large soutien, notamment celui de l’Union africaine et de la Ligue des États arabes. Gabriela Ramos, actuelle sous-directrice générale de l’UNESCO chargée des sciences sociales et humaines, est portée par son expertise dans les politiques technologiques et la régulation internationale. Enfin, Firmin Edouard Matoko, haut fonctionnaire de l’organisation, est soutenu par la République du Congo, malgré un engagement antérieur envers le candidat égyptien.
Universitaire de formation, Khaled El-Enany s’appuie sur une dynamique croissante de coopération Sud-Sud, notamment entre États africains et monarchies du Golfe. Sa candidature incarne une volonté d’ancrer l’UNESCO dans des partenariats concrets autour de l’éducation, de la culture et du patrimoine. S’il est élu, il deviendrait le premier directeur général issu du monde arabe et le second Africain à diriger l’organisation depuis sa création. Soutenu également par plusieurs capitales européennes comme Paris et Madrid, El-Enany pourrait faire le lien entre Nord et Sud dans un monde en quête de dialogue.
L’entrée en lice de Firmin Edouard Matoko, malgré une candidature égyptienne déjà soutenue par l’Union africaine, illustre les difficultés du continent à adopter une position unifiée. Fort de son expérience à l’UNESCO, Matoko incarne la continuité institutionnelle. Mais cette multiplication des candidatures africaines pourrait diluer les chances du continent, au lieu de renforcer sa voix.
De son côté, Gabriela Ramos apporte une perspective tournée vers l’avenir, en particulier sur les enjeux liés à la régulation de l’intelligence artificielle et aux transformations numériques. Ancienne de l’OCDE, elle représente une approche plus technocratique mais connectée aux grands défis contemporains, notamment l’éthique de la science et la justice sociale mondiale.
Cette élection intervient dans un contexte de fragmentation géopolitique croissante, où la légitimité et l’efficacité des institutions multilatérales sont questionnées. Plus que jamais, le profil choisi devra allier vision stratégique, capacité d’écoute et pragmatisme. Le Conseil exécutif de l’UNESCO aura la lourde tâche de départager ces trois visions du monde et de l’avenir de la coopération culturelle internationale. Une décision qui pourrait redéfinir le rôle et l’impact de l’UNESCO pour les années à venir.