Affaire foncière – A Douala, un bras de fer entre la Douane et le Mindcaf

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Malgré une décision de la Cour Suprême en sa faveur, la Mutuelle des Inspecteurs et Officiers des Douanes (MIOD) peine à jouir de son terrain à Bonamoussadi, Douala. Le Ministère des Domaines, du Cadastre et des Affaires Foncières (Mindcaf) continue de remettre en question ses droits en multipliant les attributions contradictoires. Retour sur un conflit foncier interminable.

À Douala, le terrain de 8 859 m² acquis par la Mutuelle des Inspecteurs et Officiers des Douanes (MIOD) en 1998 auprès de la Mission d’Aménagement et d’Équipement des Terrains Urbains et Ruraux (Maetur) est devenu le théâtre d’un bras de fer administratif et judiciaire. Bien que la MIOD détienne un certificat d’attribution datant de 2000 et ait obtenu un titre foncier (n° 23873), elle fait face à une série de manœuvres du Ministère des Domaines, du Cadastre et des Affaires Foncières (Mindcaf), qui tente d’attribuer le même espace à d’autres bénéficiaires.

Les tensions ont commencé en 2011, lorsque le Mindcaf a attribué le terrain de la MIOD à des particuliers via un arrêté ministériel. La MIOD, contestant cette décision, a saisi le Tribunal Administratif de la Région du Littoral, qui a annulé l’attribution en 2018. Cette décision a été confirmée par un arrêt de la Chambre Administrative de la Cour Suprême en 2021, donnant raison à la MIOD. Pourtant, malgré cette victoire judiciaire, le Mindcaf n’a pas cessé ses tentatives de réattribution du terrain à d’autres parties.

Après la décision de la Cour Suprême, la MIOD a sollicité, en juin 2022, l’établissement d’un titre foncier définitif. Mais le 7 novembre 2022, le Mindcaf a pris un arrêté transférant le même terrain à la famille Djibe Dissake, qui a rapidement obtenu un nouveau titre foncier. Face à cette décision, la MIOD a dû de nouveau contester l’attribution. En avril 2023, le Mindcaf a annulé l’arrêté accordant le terrain à la famille Djibe Dissake et a rétabli les droits de la MIOD. Cependant, deux semaines plus tard, un nouvel arrêté a réattribué le terrain aux mêmes tiers. Cette alternance de décisions a continué, plongeant l’affaire dans une confusion totale.

Malgré des arrêts judiciaires et des injonctions du Préfet du Wouri interdisant toute construction, la famille Djibe Dissake a poursuivi des travaux sur le site. La MIOD a dû saisir la justice, obtenant en mai 2023 une ordonnance du Tribunal de Première Instance de Ndokoti ordonnant l’arrêt immédiat des travaux. Cette résistance face aux décisions administratives et judiciaires a mis en lumière des pratiques troublantes au sein du Mindcaf, alimentant les soupçons de collusion avec des parties privées.

Le 13 mai 2024, après une concertation impliquant toutes les parties concernées, la MIOD a enfin reçu le titre foncier n° 23873 du Wouri B. Une victoire qui semblait définitive. Mais le 7 août 2024, coup de théâtre : le Mindcaf suspend les effets de ce titre par simple correspondance, relançant ainsi un conflit qui semblait pourtant résolu.

Exaspérée par cet éternel recommencement, la MIOD a saisi le Premier ministre pour une intervention décisive. Elle réclame l’application stricte des décisions de justice et la fin des ingérences du Mindcaf dans cette affaire qui s’éternise depuis plus d’une décennie. La question reste en suspens : l’État fera-t-il respecter les décisions de sa propre justice ou laissera-t-il cette affaire foncière s’enliser dans des jeux d’influence et d’intérêts privés ?

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