Secteur de l’électricité – Le différend entre Actis et l’État sur Eneo porté devant la CCI de Paris

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La cession des 51 % de parts détenues par Actis dans l’opérateur d’électricité Eneo connaît un nouveau rebondissement. Le fonds d’investissement britannique, confronté au refus de l’Agence de régulation du secteur de l’électricité (Arsel) d’approuver une partie de ses investissements, a saisi la Chambre de Commerce Internationale (CCI) de Paris. Cette situation impacte directement la stabilité financière d’Eneo et compromet ses capacités d’investissement.

Depuis plusieurs mois, les négociations autour du rachat des parts d’Actis dans Eneo sont dans l’impasse. En cause, un différend sur l’évaluation des investissements réalisés entre 2014 et 2024. Actis estime la valeur de ses participations à 125 milliards de Fcfa, en se basant sur des investissements évalués à 60 milliards de Fcfa. Or, l’Arsel refuse de reconnaître cette enveloppe, ce qui crée une divergence de valorisation. Pour trancher cette question, Actis a fait appel à la CCI de Paris, invoquant son contrat de concession avec l’État camerounais. L’objectif est d’obtenir une expertise indépendante qui permettra une valorisation juste et objective de ses actifs avant de finaliser la cession de ses parts.

Ce bras de fer entre Actis et l’Arsel a des conséquences majeures sur la trésorerie d’Eneo. Son directeur général, Amine Homman Ludiye, alerte sur l’incapacité croissante de l’entreprise à lever des fonds sur les marchés financiers en raison de cette incertitude. L’entreprise revendique pourtant des avancées majeures dans l’électrification du Cameroun, avec un taux d’accès passé de 56 % en 2014 à 75 % en 2024. Eneo affirme avoir injecté 400 milliards de Fcfa dans le réseau sur la dernière décennie, dont 50 % dans la distribution, 30 % dans le commercial et 20 % dans la production.

Mais cette dynamique est fragilisée par une dette qui dépasse désormais les 500 milliards de Fcfa. En 2024, l’entreprise a dû revoir son budget d’investissement à la baisse, passant de 65 milliards de Fcfa en 2023 à 52,5 milliards de Fcfa, soit une réduction de 19,10 %.

Face à cette situation, l’État camerounais a initié un audit physique des infrastructures de distribution d’électricité, notamment dans les régions du Centre et du Littoral. Cet inventaire vise à établir l’état général et la valeur comptable des installations, afin de mieux encadrer les obligations de service public d’Eneo. Les conclusions de cet audit pourraient être déterminantes pour la suite des négociations, en apportant un éclairage sur la valorisation réelle de l’entreprise et en facilitant la sortie d’Actis du capital d’Eneo. Reste à savoir si l’arbitrage de la CCI de Paris permettra de débloquer ce dossier complexe, qui pèse lourdement sur l’avenir du secteur énergétique camerounais.

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