Face à la fin imminente des programmes du FMI et aux restrictions de financement extérieur, les pays de la CEMAC se tournent vers les prêts intérieurs pour refinancer leur dette. Une solution qui accentue leur dépendance aux marchés financiers locaux, déjà fragiles et peu liquides.
L’année 2025 s’annonce complexe pour les pays de la Communauté Économique et Monétaire de l’Afrique Centrale (CEMAC). Selon une analyse de S&P Global Ratings, le financement extérieur devient de plus en plus incertain, notamment en raison de l’expiration des programmes du Fonds monétaire international (FMI) pour certains États, et de la suspension temporaire des décaissements de la Banque mondiale au Gabon.
Le Cameroun et le Congo, bien qu’ayant des accords en cours avec le FMI, voient leurs programmes arriver à terme respectivement en juillet et en avril 2025. Quant au Tchad et à la Guinée équatoriale, ils ne disposent d’aucun programme actif avec le FMI, ce qui limite leurs options. De son côté, la République centrafricaine, bien qu’ayant un accord en place, reste peu exposée aux financements internationaux.
Dans ce contexte, la solution privilégiée par ces États est le recours au marché des titres publics. Pour le premier semestre 2025, ils prévoient d’y lever environ 1 317 milliards de FCFA. Pourtant, ce marché, déjà fortement sollicité en 2023 avec 4 336 milliards de FCFA levés, souffre d’un manque de liquidité chronique.
L’exemple du Gabon illustre bien cette dépendance grandissante aux financements intérieurs. En 2024, le pays a utilisé sa monnaie locale pour rembourser une partie de son eurobond de 2015, une décision qui avait suscité des réserves du FMI. Cette tendance ne fait que s’accentuer : alors que la part de la dette intérieure représentait 8 % en 2015, elle dépassait 20 % en 2023.
L’un des principaux problèmes réside dans l’écart croissant entre l’offre et la demande sur le marché obligataire régional. Alors que le marché offrait encore 201 % de possibilités de financement il y a quelques années, ce chiffre est tombé à 44 % en octobre 2024. Par ailleurs, l’exposition des banques locales à la dette souveraine des États a doublé, passant de 14 % en 2017 à 28 % en 2024.
Néanmoins, S&P Global Ratings souligne que les besoins de financement du Cameroun, du Tchad et du Congo resteront relativement contenus, ne dépassant pas 4,1 % de leur PIB. Cette situation s’explique par la faiblesse relative des déficits budgétaires de ces États, bien que la pression sur la trésorerie demeure forte.
Pour desserrer l’étau financier, S&P Global Ratings recommande aux États de renégocier de nouveaux accords avec le FMI. Un tel soutien permettrait non seulement d’obtenir des financements extérieurs à des taux plus avantageux, mais aussi de rassurer d’autres institutions financières internationales.
Des discussions sont déjà en cours : le Gabon négocie activement un programme avec le FMI, tandis que le Cameroun et le Congo envisagent une rallonge de leurs accords pour bénéficier d’un soutien supplémentaire de la communauté des bailleurs de fonds. Ces négociations sont en ligne avec les engagements pris par les chefs d’État de la CEMAC lors du sommet de décembre 2024 à Yaoundé.