Plan d’import-substitution – Un an après son lancement, le Piisah peine à atteindre ses objectifs

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Après une année de mise en œuvre du Plan intégré d’import-substitution agro-pastoral et halieutique (Piisah), le bilan est alarmant. La production nationale décline, les importations augmentent et l’insécurité alimentaire s’aggrave. Le gouvernement camerounais fait face à d’importants défis structurels qui compromettent ses ambitions d’autosuffisance alimentaire.

Lancé en 2024 pour réduire le déficit commercial et garantir la sécurité alimentaire, le Piisah (2024-2026) semble s’éloigner de ses objectifs initiaux. D’après le rapport présenté par le Premier ministre Joseph Dion Ngute, les chiffres de production sont en chute libre. La production globale de viande, après une légère hausse en 2022, a drastiquement chuté de 32,2% en 2024, s’établissant à 347 900 tonnes. La filière halieutique suit la même tendance, avec une régression de 17,3%, soit une production de seulement 190 273 tonnes en 2024.

L’huile de palme : un produit phare en difficulté

Le palmier à huile, pourtant stratégique pour l’économie camerounaise, reste une filière en crise. Avec une demande nationale estimée à 2,4 millions de tonnes, le pays ne produit qu’environ 500 000 tonnes, très loin de l’objectif de 800 000 tonnes fixé pour 2030. La faible productivité, estimée à 4 tonnes à l’hectare contre 24 tonnes dans certains pays, illustre les difficultés structurelles du secteur.

Des secteurs sous pression

Le secteur avicole, quant à lui, affiche une baisse notable avec une production d’œufs de table en recul de 28,8% entre 2023 et 2024. Parallèlement, les importations, loin de diminuer, ont atteint 1 120 milliards de FCFA au troisième trimestre 2024, en hausse par rapport à la même période en 2023.

Une insécurité alimentaire grandissante

L’insécurité alimentaire s’aggrave également. En décembre 2024, le ministère de l’Agriculture estimait à 3,08 millions le nombre de Camerounais affectés, dont 265 314 en situation d’urgence. Ce chiffre représente 11% de la population et marque une hausse de 6,2% en un an, malgré la mise en place du Piisah.

Des défis structurels persistants

Les difficultés rencontrées trouvent leurs racines dans des problèmes structurels bien connus. Selon Hélène Rosalie Marigoh Bouquet, coordonnatrice du Programme d’appui au développement des filières agricoles (Padfa), plusieurs obstacles freinent le développement agricole :

L’accès limité aux semences de qualité et aux intrants agricoles.

Le manque d’infrastructures et d’équipements de production.

La faible organisation des producteurs et leur difficulté à accéder aux financements.

La mauvaise gestion des récoltes et une commercialisation peu compétitive des produits locaux.

Un plan ambitieux, mais mal préparé

Estimé à 1 371,5 milliards de FCFA, le Piisah ambitionnait de consacrer 248,4 milliards en 2024, puis 511,6 milliards en 2025 et 611,4 milliards en 2026. Les filières bovine, laitière, rizicole, céréalière et halieutique figuraient parmi les priorités. Cependant, l’absence de prérequis essentiels, tels qu’une meilleure structuration des filières ou une intensification des capacités de production, compromet son efficacité.

Vers une révision stratégique ?

Face à ces échecs, une révision stratégique s’impose. Le gouvernement devra renforcer les capacités locales, améliorer l’accès aux intrants, et promouvoir des technologies modernes pour augmenter les rendements. Le Cameroun joue ici une partie cruciale pour son avenir économique et social. Si rien n’est fait, l’objectif d’autosuffisance alimentaire risque de demeurer un rêve lointain, tandis que les défis de l’import-substitution continueront de peser sur l’économie nationale.

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