À l’arrêt depuis 2019, la Société nationale de raffinage (Sonara) entame une nouvelle étape dans son processus de réhabilitation. Entre dettes écrasantes, importations massives et enjeux environnementaux, le gouvernement camerounais intensifie les démarches pour redonner vie à cet acteur clé de l’industrie pétrolière nationale.
Inaugurée en 1981, la Sonara, située dans le Sud-Ouest du Cameroun, était le pilier de l’approvisionnement en produits pétroliers pour le pays et la sous-région. Cependant, depuis un incendie majeur en 2019, ses activités sont à l’arrêt. La dépendance croissante du Cameroun aux importations de produits pétroliers finit accentue les pressions financières et économiques, fragilisant également les réserves de change communes des pays membres de la Cemac. Face à cette situation, le gouvernement camerounais a réaffirmé la réhabilitation de la Sonara comme une priorité. Lors de la session parlementaire de décembre 2024, le Premier ministre Joseph Dion Ngute a annoncé le lancement imminent d’études technico-économiques et financières approfondies pour relancer les activités de la raffinerie. Ces démarches incluent la possibilité de produire des carburants conformes aux normes Afri 5/Afri 6 et un fuel-oil respectant les exigences de la convention environnementale Marpol.
Une dette écrasante et des défis financiers
La réhabilitation de la Sonara se heurte à un obstacle majeur : sa dette colossale, estimée à 1 000 milliards de FCFA en 2020. Une taxe dédiée, introduite la même année, permet de collecter des fonds pour son apurement. À ce jour, environ 353 milliards de FCFA ont été mobilisés grâce à cette mesure. Malgré ces efforts, la dette reste un frein pour les projets de réhabilitation. En 2023, deux cabinets d’ingénierie, Chemex Global LLC (États-Unis) et Performance Plus Innovation (France), ont été recrutés pour réaliser des études de conception détaillées (FEED). Toutefois, faute de moyens financiers suffisants, ces études n’ont pu être achevées, retardant encore le processus.
Recrutement d’experts internationaux
Pour relancer le projet, une nouvelle procédure d’urgence a été lancée le 1er août 2024. Le gouvernement cherche désormais à recruter trois cabinets spécialisés de renommée internationale pour évaluer la faisabilité de la production aux normes internationales. Ces experts auront également pour mission d’assurer la conformité environnementale des produits raffinés, une exigence cruciale dans un contexte mondial de réduction des émissions de gaz à effet de serre.
Une dépendance croissante aux importations
En 2024, le Cameroun a importé 1,6 million de tonnes métriques de produits pétroliers finis pour répondre à la demande nationale. Cette dépendance grève les réserves de change du pays et fragilise la position économique de la zone Cemac, dont le Cameroun est le principal contributeur. Le gouverneur de la Banque des États de l’Afrique centrale (BEAC), Yvon Sana Bangui, a souligné l’urgence de la réhabilitation de la Sonara lors d’une conférence de presse en juin 2024. Il a insisté sur la nécessité pour les pays de la sous-région de réduire leur dépendance aux importations pétrolières, qui impactent négativement les réserves monétaires communes.
Un avenir à construire
La réhabilitation de la Sonara n’est pas qu’un enjeu national. Elle représente une solution pour préserver les réserves de change de la zone Cemac, renforcer la souveraineté énergétique du Cameroun et réduire la facture énergétique du pays. Malgré les nombreux défis financiers et techniques, les autorités camerounaises continuent d’avancer sur ce projet stratégique. Avec le soutien des partenaires internationaux et une volonté politique affirmée, le redémarrage de la Sonara pourrait marquer une nouvelle ère pour l’industrie pétrolière camerounaise et régionale.