Deux mois après le lancement des travaux de la phase 2 de l’autoroute Yaoundé-Douala, les engins de l’entreprise CFHEC sont à l’arrêt à Bibodi. En cause, le non-paiement des indemnités aux populations riveraines. Face à la crise, les autorités multiplient les concertations pour apaiser les tensions.
Les bulldozers et autres engins de la China First Highway Engineering Company (CFHEC) sont à l’arrêt depuis le 17 décembre 2024 à Bibodi, localité située sur le tracé de la phase 2 de l’autoroute Yaoundé-Douala. Les populations, mécontentes de ne pas avoir reçu les indemnités promises pour leurs biens détruits ou leurs terres expropriées, ont imposé la suspension des travaux. Le Ministère des Travaux Publics (MINTP) a confirmé cette interruption, attribuant la responsabilité au retard dans le paiement des compensations.
Concertations en cours pour apaiser les tensions
Dans une tentative de désamorcer la crise, le ministre des Travaux Publics, Emmanuel Nganou Djoumessi, a tenu une réunion le 9 janvier 2025 avec des représentants des populations concernées. Objectif : convaincre les riverains de permettre la reprise des travaux. « Aucun bien ni maison ne sera détruit sans indemnisation des propriétaires », a-t-il assuré, tout en annonçant des mesures concrètes. Parmi celles-ci : indemniser de manière anticipée les populations situées sur les emprises directes, élargir les compensations aux riverains des zones proches de l’autoroute, et exiger de l’entreprise CFHEC qu’elle reprenne les travaux.
Une répétition des erreurs du passé
Les mêmes problèmes avaient émaillé la phase 1 de l’autoroute, où CFHEC avait déjà stoppé ses activités pour des raisons similaires. Malgré les engagements pris par le gouvernement à l’époque, les retards dans le paiement des indemnisations continuent de perturber l’avancée du projet. Henri Eyebe Ayissi, ministre des Domaines, du Cadastre et des Affaires Foncières (MINDCAF), avait pourtant déclaré lors du lancement officiel de la phase 2, en octobre 2024, que les sites seraient mis à la disposition de l’entreprise et que toutes les mesures d’anticipation avaient été prises.
Un processus administratif au ralenti
Naseri Paul Bea, Gouverneur de la région du Centre, explique que le dossier d’indemnisation est actuellement en attente de la signature d’un décret par le Premier Ministre. « La Commission d’évaluation des indemnisations a déjà achevé son travail, et la liste des bénéficiaires a été affichée », a-t-il précisé. Cependant, les retards administratifs ajoutent une nouvelle couche de frustration pour les populations, qui ont l’impression que leurs droits sont constamment ignorés.
Un projet aux enjeux majeurs
L’autoroute Yaoundé-Douala, projet phare du Cameroun lancé en 2016, vise à relier les deux principales villes du pays pour stimuler l’économie et améliorer les conditions de vie des populations. Cependant, les retards et les tensions sociales liés aux indemnisations ternissent l’image d’une infrastructure censée être porteuse de développement. Pour les riverains, l’autoroute représente autant une opportunité qu’une menace : elle pourrait améliorer leur quotidien, mais seulement si leurs droits sont respectés. À ce jour, le gouvernement semble peiner à concilier ces deux réalités.
Le blocage des travaux sur la phase 2 de l’autoroute Yaoundé-Douala illustre une fois de plus les défis liés à la gestion des grands projets d’infrastructure au Cameroun. La reprise des travaux dépend désormais de la capacité des autorités à tenir leurs engagements vis-à-vis des populations concernées. Faute de quoi, ce chantier risque de rejoindre la liste des projets interminables du pays.