Réunis en sommet extraordinaire à Yaoundé, les chefs d’État de la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (Cemac) ont adopté une série de mesures visant à renforcer les réserves de change, soutenir les banques et freiner l’endettement. Une stratégie globale pour éviter une spirale économique critique dans une sous-région déjà fragilisée.
Face à la baisse préoccupante des avoirs en devises des pays membres, la Cemac s’est engagée à inverser cette tendance. Selon le rapport publié lors du sommet, sans réformes majeures, les réserves de change pourraient tomber à seulement trois mois d’importations d’ici cinq ans, bien en deçà du seuil de tolérance de quatre mois. Actuellement, ces réserves représentent à peine 2,1 mois d’importations hors appuis budgétaires du FMI. Pour y remédier, les dirigeants ont appelé à une stricte application de la réglementation de change, en particulier le rapatriement des devises par les opérateurs économiques et les entreprises extractives. Ces dernières, souvent réticentes à rapatrier leurs fonds, devront signer des conventions de compte séquestre avant avril 2025, marquant la fin des délais accordés.
La crise des réserves de change s’ajoute à une pression croissante sur le secteur bancaire régional. Avec une hausse de 11 % des créances en souffrance et près de 40 % des banques ne respectant pas les ratios réglementaires, la situation est critique. À cela s’ajoute la restructuration envisagée de la dette souveraine congolaise, qui pourrait affecter la liquidité des banques détenant jusqu’à 80 % des titres émis sur le marché public. Les chefs d’État ont donc demandé une gestion prudente de l’exposition des banques aux risques souverains, rejoignant les récentes directives de la Commission bancaire de l’Afrique centrale (Cobac).
Dans une sous-région où certains pays dépassent le seuil de 70 % d’endettement par rapport au PIB, les dirigeants ont insisté sur la nécessité d’une politique d’endettement prudente. Les financements concessionnels, moins onéreux que les emprunts sur les marchés financiers, sont à privilégier. Cette orientation vise à réduire la pression sur les budgets nationaux tout en maintenant les investissements nécessaires au développement.
Pour stabiliser l’économie, la Cemac mise aussi sur le soutien de partenaires internationaux, notamment le FMI, afin de finaliser les revues des programmes en cours pour le Cameroun, le Congo et la République centrafricaine. Les États n’ayant pas encore de programme avec l’institution de Bretton Woods ont été invités à en conclure un rapidement. « Notre communauté est un atout. Ce n’est qu’ensemble que nous pouvons surmonter les difficultés actuelles », a rappelé le président camerounais Paul Biya en clôturant le sommet.
Alors que la Cemac traverse une zone de turbulence, les résolutions adoptées lors du sommet de Yaoundé apparaissent cruciales pour éviter une dégradation économique majeure. Toutefois, leur mise en œuvre nécessite une mobilisation concertée des États membres et des opérateurs économiques, sous peine de voir la sous-région s’enliser davantage.