Face à des besoins de financement chiffrés à 1 795 milliards de FCFA en 2025, le Cameroun prévoit de mobiliser plus de 600 milliards FCFA sur le marché domestique. Cependant, la hausse des taux d’intérêt et une concurrence accrue compliquent les levées de fonds, fragilisant la position du pays sur le marché des titres publics en Afrique centrale.
Le projet de loi de finances 2025, actuellement en examen à l’Assemblée nationale camerounaise, prévoit une réduction des besoins de financement de l’État de 275,1 milliards de FCFA par rapport à 2024, atteignant ainsi 1 795 milliards de FCFA. Pour combler cet écart, le Trésor public projette de mobiliser 600,6 milliards de FCFA via des emprunts domestiques. Cette enveloppe comprend 220,6 milliards de FCFA sur le marché bancaire et 380 milliards de FCFA par l’émission de titres publics. Une partie de ces fonds pourrait être levée sur le marché unifié de la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (Cemac), avec un emprunt obligataire envisagé. Cependant, les conditions économiques actuelles rendent ces perspectives incertaines.
Depuis 2022, les taux d’intérêt pratiqués sur le marché des titres publics de la Banque des États de l’Afrique centrale (BEAC) connaissent une hausse significative. Cette situation profite à des États aux signatures financières plus risquées mais offrant des rendements plus attractifs, jusqu’à 7 %, contre environ 4 % pour les titres camerounais à court terme. Samuel Tela, directeur de la trésorerie au ministère des Finances, ne cache pas ses inquiétudes : « Nous levions les ressources avec facilité. Aujourd’hui, nous avons du mal à refinancer nos remboursements. » Cette réalité reflète les difficultés croissantes de l’État à maintenir son attractivité auprès des investisseurs.
Sur le marché unifié de la Cemac, la situation n’est guère meilleure. La Bourse des valeurs mobilières de l’Afrique centrale (Bvmac), basée à Douala, souffre d’un climat financier tendu. La hausse des taux d’intérêt des banques accentue les difficultés des emprunteurs, y compris des institutions comme le Gabon ou la Banque de développement des États de l’Afrique centrale (Bdeac). Ces derniers ont dû prolonger les périodes de souscription pour boucler leurs levées de fonds en 2024. Pour le Cameroun, les difficultés se sont traduites par un report de son emprunt obligataire de 200 milliards de FCFA prévu en 2024. Malgré ce contexte, le pays espère maintenir son statut de locomotive économique régionale, en misant sur sa crédibilité financière.
Le Cameroun devra faire preuve de résilience et d’ingéniosité pour convaincre les investisseurs et mobiliser les fonds nécessaires à son budget. Les autorités misent sur des taux d’intérêt compétitifs tout en incitant les banques et les investisseurs à privilégier la stabilité offerte par les titres camerounais. Dans un contexte de concurrence accrue et de conditions économiques incertaines, réussir ce pari serait une démonstration de force pour l’économie camerounaise et un levier de croissance pour l’ensemble de la Cemac.