Face à une concurrence jugée déloyale et des importations massives de sucre, Sosucam, le principal producteur national, accuse une chute drastique de ses ventes. Cette situation engendre une perte colossale pour l’État en recettes fiscales et menace la survie de l’entreprise.
Le 19 novembre 2024, lors d’une réunion avec le ministre du Commerce, Luc Magloire Mbarga Atangana, Jean-Pierre Champeaux, directeur général de la Société sucrière du Cameroun (Sosucam), a tiré la sonnette d’alarme. Avec une production annuelle moyenne de 100 000 tonnes sur les trois dernières années, Sosucam fait face à une concurrence féroce des importations de sucre. Selon les données des douanes (CAMSIS), ces importations ont atteint 250 000 tonnes au 31 octobre 2024, excédant largement les besoins nationaux estimés à 240 000 tonnes. La situation est d’autant plus préoccupante qu’elle s’inscrit dans la continuité de 2023, année où les importations avaient dépassé 280 000 tonnes. Malgré les engagements du gouvernement de limiter les importations en 2024, des entreprises non identifiées continuent d’inonder le marché de sucre granulé importé sans transformation préalable, enfreignant ainsi la réglementation.
Cette surabondance de sucre a entraîné une baisse significative des prix, rendant difficile la concurrence pour Sosucam. Conséquence : une chute des ventes estimée à 25 % entre janvier et octobre 2024. Ce ralentissement commercial a également coûté à l’État plus de 3,1 milliards de FCFA en recettes de TVA sur la même période. Dans ce contexte, l’entreprise, déjà confrontée à des coûts croissants des intrants et à des conditions climatiques défavorables, peine à maintenir sa rentabilité. Jean-Pierre Champeaux a souligné que Sosucam, malgré un chiffre d’affaires annuel de 65 milliards de FCFA, est en situation critique.
Pour faire face à cette crise, Sosucam a été recapitalisée à hauteur de 34 milliards de FCFA par son actionnaire principal, le groupe français Somdia, et a lancé un plan d’investissement de 40 milliards en 2023-2024. Toutefois, depuis le 1er novembre 2024, l’entreprise a dû limiter ses recrutements en contrats à durée indéterminée et déterminée au strict nécessaire pour la campagne 2024-2025. Malgré ces difficultés, Sosucam reste l’un des piliers de l’agro-industrie au Cameroun, avec 6 000 employés, 2 500 sous-traitants et une exploitation de 25 000 hectares de plantations dans les arrondissements de Mbandjock, Nkoteng et Lembe-Yezoum. L’entreprise poursuit son plan de développement, visant une production annuelle de 130 000 tonnes d’ici 2027.
Sosucam appelle les autorités à agir fermement pour réguler les importations et garantir un cadre commercial équitable. Sans intervention rapide, l’entreprise risque de perdre davantage de parts de marché et de compromettre sa survie, avec des conséquences sociales et économiques graves pour le pays.